Les toiles et la sélection de dessins de George Shaw que présente la galerie Maruani Mercier, racontent avec réalisme et précision la spécificité anglaise des paysages post-industriels de Tile Hill, une banlieue ouvrière de Coventry. L'artiste britannique, nominé pour le prestigieux Turner Prize en 2011, promène son regard le long des rues et ruelles des lotissements de logements sociaux qui l'ont vu grandir dans les années 70 et traduit avec une certaine nostalgie l'atmosphère qui a bercé son enfance. L'exposition intitulée The Lost of England ("Les laissés-pour-compte de l'Angleterre") fait référence au Brexit et propose une réflexion sur le souvenir et sur le temps qui passe.
Les tableaux sont réalisés à l'émail Humbrol, une peinture prisée par les maquettistes et dont quelques pots sont alignés sur le comptoir à l'entrée de la galerie. D'une minutie extrême, les toiles ont une brillance qui rappelle celle des tirages photos sur papier glacé et le rendu des couleurs est à la fois riche et intense.
L'accrochage déroule, façon "travelling" cinématographique, des paysages urbains sinistrés voir délabrés. Bien que la démarche de l'artiste s'apparente à celle des cinéastes du "Kitchen Sink," (un genre socio-naturaliste des années 50-60 qui décrit le désenchantement et les frustrations des classes laborieuses), on a le sentiment que George Shaw a pris un réel plaisir à reproduire, en s'inspirant de la centaine de clichés qu'il photographie lors de chacune de ses promenades, les ruelles désertes, les rangées de garages, les terrains de foot abandonnés, les parcs jonchés de détritus... Jamais explicite, la présence humaine se devine en filigrane: un ballon abandonné, l'ombre projetée d'une silhouette, une antenne parabolique, des graffitis sur des façades ou encore des feuilles mortes piétinées.